Hiroshima. 1945. Témoignages des hibakusha... les survivants.

    Je m'étais jurée de ne jamais rouvrir ce livre... et pourtant, à plusieurs reprises, j'en ai relu des extraits, parfois les passages les plus terribles, parce qu'il ne faut pas oublier.

L'histoire occidentale a bien peu de compassion pour les civils japonais, morts sous les bombardements américains au cours de la seconde guerre mondiale.

Dans Hiroshima, le reporter John Hersey  nous donne toute la mesure de la situation des survivants, victimes de la bombe atomique.

       

Aux éditions Robert Laffont, 2005. L'édition originale est parue en 1946.

 

    8h 15. Heure japonaise. Impact de la première bombe atomique de l'histoire sur Hiroshima.

" Tout le jour, les gens ne cessèrent d'affluer dans le parc Asano. Cette propriété privée se trouvait assez loin du centre de l'explosion pour que ses bosquets de bambous, de pins, de lauriers et d'érables fussent encore debouts [...]. Mme Nakamura et ses enfants furent parmi les premiers arrivés [...]. Tous quatre avaient très soif et burent à même l'eau courante. Ils eurent beaucoup la nausée et se mirent à vomir; la nausée ne les quitta pas de la journée. il en alla de même pour d'autres; tous s'imaginèrent ( probablement en raison de la forte odeur d'ionisation, de ce " relent d'électricité " que laissait l'action désintégrante de la bombe ) que ce qui les rendait malades, c'était un gaz projeté par les Américains [...].

Sur la berge, M. Tanimoto trouva quelque vingt hommes et femmes. Il rangea le bateau le long de la rive et leur dit de se dépêcher de monter. ils ne bougèrent pas et il se rendit compte qu'ils étaient trop faibles pour se lever. Il se pencha et pris une femme par les mains; la peau céda et vint sous ses doigts, par lambeaux énormes, comme un gant. Cette sensation éveilla une telle nausée qu'il dut s'asseoir un instant [...]. Il se souvint non sans malaise des graves brûlures qu'il avait vues durant la journée : jaunes d'abord, puis rouges et gonflées, la peau s'en allant en lanières; et pour finir, sur le soir, suppurantes et sentant mauvais [...].

L'air, ce matin là, était aussi brûlant que la veille. Le père Kleinsorge se mit en quête d'eau pour les blessés [...]. Alors qu'il cherchait à se retrouver parmi les bosquets, il entendit une voix montant des broussailles, qui demandait : " Avez-vous quelque chose à boire ? "[...]. Il vit un uniforme. Croyant ne trouver qu'un seul soldat, il s'approcha avec son eau. Lorqu'il eut pénétré dans les broussailles, il vit qu'ils étaient une vingtaine, tous exactement dans le même état cauchemardesque: le visage entièrement brûlé, les orbites vides, les yeux fondus se répandant en humeur sur les joues [...]. En place de bouche, ils n'avaient qu'une plaie, enflée, couverte de pus, si douloureuse qu'ils n'arrivaient même pas à entrouvrir les lèvres pour y insérer le bec de la théière [...].

Les médecins à Hiroshima avaient commencé à se rendre compte que l'explosion de la bombe entraînait des conséqences beaucoup plus graves que les blessures traumatiques et les cicatrices à chéloïdes apparues si dramatiquement dans les premiers temps. Les violents symptômes des toutes premières maladies dues à l'irradiation s'estompèrent avec le temps chez la majorité des patients, mais il devint vite évident que les hibakusha étaient à même de développer des séquelles plus profondes et beaucoup plus dangereuses en raison des doses de radiation énormes transmises par la bombe ".

Dès les années 1950, les hibakusha - surtout ceux situés à moins d'un km au moment de l'impact - développent des leucémies 10 à 50 fois supérieure à la moyenne. Thyroïde, foie, poumons, voies urinaires, organes reproducteurs sont touchés. On constate un  retard de croissance pour les enfants exposés. Les survivants souffrent d'anémie, de problèmes sexuels, de vieillissement accéléré et de dépression.

Un an après le bombardement, les habitants d'Hiroshima continuent à vivre dans les décombres, sans électricité. Leur colère à l'égard des américains se retourne progressivement vers l'Etat japonais, jugé responsable de la situation.

Dans les années 1960, de nombreux japonais, dont les survivants, s'inquiètent d'éventuelles mutations sur les populations touchées.

Le 6 août 1949, jour de la commémoration du bombardement américain sur Hiroshima, une loi fait de la ville un mémorial de la paix. Au coeur du parc commémoratif, un cénotaphe rappelle la mémoire des disparus.

Les guerres laissent toutes derrière elles leur lot de victimes et leurs traumatismes.

Lorsqu'il s'agit du sort des populations civiles, peu importe le camp des vainqueurs ou des perdants. On oublie souvent que les civils paient un lourd tribut.

LIEN BLOG. Vous pouvez retrouver un article à ce sujet sur le blog de François, qui a une passion pour le Japon.

Commentaires

1. Le jeudi 29 janvier 2009, 23:27 par Dane

c'est vrai comment ,peut-on vivre après avoir vu de telles atrocités ....................

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